Un projet en sixième au collège République à
Cayenne 2001/2002
CLASSE à PAC
Classe 609 COLLEGE REPUBLIQUE
APPROCHE DU PATRIMOINE GUYANAIS
A TRAVERS DES CONTES ALUKUS ET PALIKUR
PROFESSEURS :
Madame LAMPECINADO (français)
Madame LAUNEY (français soutien)
Monsieur RAFALI (éducation musicale)
INTERVENANTS :
Lama Topo conteur aluku, association culturelle aluku Maripasula
Mauricienne Fortino, Alexandre Baptista, association culturelle palikur
"KAMAWYENEH" (1 bis Village indien PR 24
RN1 MACOURIA 97355)
OBJECTIFS :
Meilleure connaissance de deux cultures guyanaises par l'intermédiaire
d'écoute de contes racontés par des conteurs aluku et palikur.
Meilleure maîtrise de l'oral par la restitution orale des contes
entendus lors d'une soirée conte au collège
PREPARATION DU PROJET :
Octobre Novembre :
- en cours de français :
- lecture de contes dans le recueil "12 contes de Guyane " réécrits
par Y M Clément (édition castor poche)
- recherche documentaire sur l'environnement et les cultures citées
dans les contes, sur les aluku et les palikur
-en cours de musique :
préparation et visite de l'exposition de la maison des cultures
guyanaises sur les musiques traditionnelles de Guyane.
DEROULEMENT :
Novembre décembre :
- écoute de contes aluku pendant 5 séances d'une heure
restitution de ces contes par les élèves en cours de français
Janvier Février:
- écoute de contes palikur 4 séances d'une heure
- animation autour de la danse palikur à propos d'un des contes
"la femme baboun" en cours de français
- visite du village palikur de Macouria, rencontre avec des vannières,
visite d'abattis
Mars Avril :
- préparation en cours de français d'une soirée
conte au collège où les élèves raconteront
les contes entendus.
-éventuellement avec ceux qui en seront capables réécriture
d'un conte entendu et illustration en vue d'un petit recueil
- en cours d'éducation musicale: préparation d'un
accompagnement musical de percussions pour la soirée conte
début mai:
-soirée contes au collège avec les enfants conteurs et
un appel à d'autres conteurs dans le public
Le déroulement
La classe
Choisie par hasard cette classe se révèle en grande difficulté
d'après les résultats aux tests d'évaluation sixième
avec un
comportement très difficile. (Ainsi les pourcentages de réussite
en français se situent autour de 45% et de 35% en maths
alors que le collège République toourne autour de 50%
quand les chiffres nationaux sont de 60%
Seuls une poignée d'élèves
sont capables de tirer profit de l'enseignement dispensé au niveau
sixième. La moitié a un an de retard, le quart deux ans ;
un élève est illettré bien qu'ayant suivi une scolarité
normale depuis le CP ; deux autres ont un niveau de fin CE1, la majorité
éprouve de sérieuses difficultés à l'écrit
et en lecture. Dès les premiers cours la classe va exprimer son
rejet de l'école par un comportement de groupe violent et très
difficile à gérer.
Les conditions de prise en charge sont bonnes voires
exceptionnelles puisque cette classe bénéficie de 7h de français
dont une heure de soutien à 12 élèves en salle d'informatique.
Le professeur de soutien assiste à une heure de français
à partir de janvier. On peut donc dire que les élèves
ont bénéficié de 8 heures de français
ce qui a créé les conditions de succés du projet.
Cette classe fera l'objet d'un suivi quasi permanent
par l'administration, les CPE, l'assistante sociale , le médecin
scolaire qui finira par porter ses fruits mais le rôle du projet
a été très important de l'avis de tous par ses retombées
très positives constatées au conseil de classe du dernier
trimestre.
Modifications par rapport au projet :
Changement
dans l'équipe : outre les deux enseignants de français
prévus, le professeur d'histoire géo, Madame Evuort, se rallie
avec un projet sur l'étude du milieu et de la commune de Macouria.
Le professeur d'éducation musicale, découragé par
l'attitude des élèves, se retire mais suit attentivement
et le groupe finira par s'assagir dans son
cours vers février et lui réservera une surprise lors
de la veillée contes. Le professeur d'arts plastiques , Madame Caravero,
suit de près le projet et intervient au dernier trimestre dans la
réalisation finale du recueil.
Changement
chez les intervenants : Le conteur aluku ne viendra qu'une fois pour
des raisons personnelles et il sera fait appel à Frank Compper pour
une séance d'une heure et demie.
La préparation des interventions :
La séquence
contes en cours de français
Elle a lieu en novembre-décembre avec des contes très
divers car le livre de contes de Guyane n'est pas arrivé. L'acquisition
de la structure traditionnelle des contes européens est admise.
Mais l'appel à l'oral est systématique. Les enfants qui connaissent
des contes commencent à en raconter. Toute la classe a acquis les
formules de début de contes qui circulent encore en Guyane. Il y
a bien en Guyane des braises qu'il suffit de ranimer. Leur étonnement
sera grand quand ils rencontreront les contes palikur amérindiens,
très différents dans leur structure et sans formule de début.
Une introduction
aux langues et cultures présentes dans la classe est abordée
en particulier par le biais du conte Haïtien « TEZEN poisson
d'eau douce » dans une version bilingue écrite par Mimi
Barthélémy (édition l'Harmattan). Le professeur de
français, d'origine antillaise et qui maîtrise bien les différents
créoles français présents en Guyane, introduit une
ou deux pages en créole écrit. Des enfants haïtiens,
dont une jeune fille très timide, se révèlent alors
car ils connaissent la chanson. Cette séance est très importante
dans la constitution d'un réel groupe classe en dehors de celui
quíessayaient de constituer les meneurs dans la violence et le refus de
líécole. On le verra lors de la réalisation de la veillée
contes.
Des recherches sont faites avec les élèves
sur les cultures de Guyane à l'aide de document et de la video réalisée
par les enfants du Fleur de Lampaul chez les Wayanas.
Des contes écrits sont lus en classe : Maïpouri,
conte galibi, le colombo de tortue, issus de différents recueils
de contes de Guyane.
Une première sortie sur les arbres du quartier,
avec visite de l'Herbier de Guyane, permet à la classe d'évoluer
dans son comportement car c'est un enjeu pour des sorties futures dont
les enfants sont très conscients. Un travail en informatique de
rédaction à partir de photos est réalisé avec
succés et beaucoup de plaisir. Cette réalisation est envoyée
aux correspondants d'Angers. C'est l'occasion de découvrir l'environnement
présent dans les contes et pour certains élèves de
mettre en valeur leurs connaissances de ce milieu acquises dans la famille
même si cela concerne bien peu d'élèves.
Les séances avec conteurs ont démarré
en décembre ; le premier conteur, Aluku, Lama Topo n'a pu
venir qu'une fois pour des raisons personnelles ; la séance a été
excellente avec de nombreuses questions des élèves sur la
culture, le mode de vie et la langue aluku. Beaucoup de questions aussi
sur le « statut » du conteur : Comment devient-on conteur ?
Où avez-vous appris vos contes ? Le conteur, médiateur culturel
et bilingue à Maripasoula, est très motivé et apprécié
; les enfants sont surpris et intéressés par ce qu'ils apprennent
sur le rôle qu'il joue à l'école dans le cadre d'un
projet mis en place depuis 4 ans par le Rectorat de Guyane sur la présence
des langues maternelles dans une vingtaine d'écoles. C'est aussi
l'occasion d'acquérir des connaissances sur la géographie
de la Guyane : où est Maripasoula ? Comment s'y rend-on ? Comment
y vit-on ? ainsi que sur l'histoire : Qui sont les Noirs marrons ? D'où
viennent-ils ? etc...
Les contes [dont : "COCHONS-BOIS"]sont
racontés en aluku d'abord et un élève de la classe
qui a vécu à Saint Laurent et comprend cette langue en fait
d'abord une traduction globale avant que le conteur n'en donne une traduction
écrite. Cet élève, totalement illettré, se
révèle dans la classe. Il a beaucoup de connaissances du
milieu de la forêt et sera passionné d'un bout à líautre
de l'année par le projet conte.
Au cours de cette séance les élèves
sont très attentifs, participent beaucoup et se montrent disposés
à faire des comptes rendus individuels qui restent encore assez
pauvres mais l'écrit n'est plus objet de rejet. Le groupe de soutien
en français rédige une lettre aux correspondants d'Angers
en salle d'informatique. Cette démarche sera ensuite systématique
et allant de soi. En cours d'année c'est toute la classe qui reprend
la démarche de compte rendu avec plaisir et aura aussi accès
à la salle díinformatique.
Appel a donc été fait à un autre
conteur pour assurer des séances en décembre et Franck
Compper a pu venir une fois une heure trente pour raconter des
contes
divers dont deux en créole qui marqueront beaucoup les élèves.
Cette séance ne pourra se renouveler pour des raisons d'emploi du
temps.
Les séances de contes amérindiens
palikur :
5 ont lieu comme prévu en janvier et févrieravec
madame Mauricienne Fortino qui vient une heure par semaine et raconte
2 à 3 contes par séance. Ces contes sont très longs,
n'ont pas la structure «Propp ». Ils sont une sorte de voyage
aventureux qui donne des renseignements sur les croyances et le mode
de vie des Palikur. Ils sont actuellement inédits mais ressemblent
pour certains à d'autres contes amérindiens de Guyane.
Ces contes sont l'occasion de nombreuses explications
sur le mode de vie des palikur : l'abattis, le cachiri, le hamac, la pêche,
la chasse, les animaux de la forêt, les arbres et les plantes, mais
aussi la façon de penser les rapports humains, le rôle des
femmes, les différents apprentissages, les conceptions sur l'au
delà, la mort, le sens de la vie, le rôle des chamanes. Les
enfants posent de nombreuses questions et se montrent passionnés
et très attentifs. avec de nombreuses
remarques pertinentes qui montrent bien que leur échec scolaire
n'est pas une fatalité. Ce sont ceux qui sont le plus en rupture
scolaire qui se manifestent le plus mais aussi les quelques « bons
élèves » de la classe dont l'implication ne cessera
d'augmenter.
Pour le moment aucun « travail » scolaire
ne leur est demandé : il s'agit bien de la phase d'imprégnation
prévue dans le projet.
Un bilan sur les contes entendus est écrit
collectivement : au cours d'un débat oral un texte collectif est
écrit au tableau complété par la mise en commun de
petits textes individuels. (voir la page intitulée « contes
palikur » dans le recueil). Cette analyse montre bien que des connaissances
réelles bien quíincomplètes sur les Palikur sont passées
grâce à la venue de la conteuse.
La sortie à Macouria:
Le mois de mars est réservé à
sa préparation en français et en géographie avec recherche
documentaire ; un questionnaire sur la visite du village palikur de Macouria
et des abattis collectif.
Voici ce questionnaire :
SORTIE DU 20 MARS 2002 MACOURIA
EMPLOI DU TEMPS :
9h40 Arrivée au village de Kamuyene visite avec Alexandre Batista
: présentation de divers objets, recette du cachiri. Retour au carrefour
pour voir les vanniers au travail
11h Départ pour le collège de Macouria :Visite des abattis
à 10mn de marche avec M Batista
12h 30/ 13h 15 : pique-nique dans les locaux du collège
13h 15 départ pour Savane Matiti : visite de líexploitation
agricole de M et Mme Buffard
16h15 départ en car pour Cayenne
QUESTIONNAIRE :
1 L'arc :
1.1 Comment fait-on un arc ? Avec quels bois ou plantes ? quels traitements
lui fait-on subir ?
1.2 D'où vient la corde ? Comment sont faites les flèches
? Comment est fait le bout des flèches ? Sont-elles parfois
empoisonnées ? avec quoi ? dans quelle intention ? Les utilisez-vous
encore ?
1.3 Que peut-on faire d'autre avec un arc à part chasser ? Est-ce
que c'est difficile d'utiliser un arc ?
1.4 Quels animaux chassez-vous ?Quel animal est le plus chassé
? Que faites-vous de l'animal tué ?
1.5 Apprenez-vous à faire des arcs et à chasser à
vos enfants ?
2-Le cachiri :donnez-nous
la recette
3- La vannerie :
3.1 Quel est le ou les matériaux utilisés ? Où
allez-vous les chercher ? comment préparez-vous ces matériaux
? est-ce que
c'est le même matériau pour l'éventail et le panier
?quels outils utilisez-vous ?
3.2 Quels objets fabriquez-vous ? quelle en est l'utilisation ? Combien
de temps prenez-vous pour faire un objet ?
Faites-vous ce travail tous les jours ?
3.4 Comment faites-vous les dessins et les motifs géométriques?
Comment avez-vous appris à les faire ?
3.5 A qui les vendez-vous ? A quel prix ?
3.6 Comment avez-vous appris votre art ?Apprenez-vous à faire
de la vannerie à vos enfants? Leur apprenez-vous à faire
des couronnes de plumes et des canots ?
4-Les abattis :
4.1 Pourquoi cultivez-vous un abattis ? Avez-vous choisi de cultiver
un abattis ou aimeriez vous mieux faire un autre métier ?
4.2 A qui les abattis appartiennent-ils ? Comment vous organisez-vous
pour cultiver ? Le faites-vous tout seul ?
4.3 Combien de temps dure un abattis? Pourquoi ?
4.4 Quelle surface cultivez-vous ?
4.5 Comment faites-vous pour préparer votre abattis ?
4.6 Quelles plantes cultivez-vous en général et vous
en particulier ? Comment faites-vous pousser les plantes ?
4.7 Combien de temps travaillez-vous par jour ? A quelle heure commencez-
vous ? A quel moment travaillez-vous dans votre abattis ? Y a-t-il des
dates précises où vous devez planter ou récolter ?
4.8 Vendez vous une partie de votre production ou est-ce uniquement
pour votre consommation personnelle ?
4.9 Comment faites-vous le couac
?
4.10 Comment avez-vous appris à cultiver un abattis ? Est-ce
que les jeunes continuent à apprendre ?
4.11 Quelles difficultés rencontrez-vous ? Que faites-vous contre
les animaux qui font des dégâts dans l'abattis ? Y a-t-il
des esprits dans l'abattis ?
Les réponses à ces questions seront mises en commun et
donneront le texte « sortie à Macouria » :
Visite du village amérindien de Macouria
(Kamouyéneh) le 20 mars 2001
- M. Batista nous accueille sous le carbet de son
association et nous montre divers objets : coiffe
de plumes, arcs et
flèches, vanneries.
Nous allons voir ensuite les vanniers et vannières qui travaillent
sur le bas côté de la route nationale. De nombreuses explications
sont données à leur sujet dont les enfants feront un compte
rendu dans le texte « visite à Macouria »
- Nous allons ensuite visiter les abattis collectifs
du village qui se trouvent dans une zone de marais derrière le collège.
Cet endroit est magnifique, comporte un carbet collectif pour la fabrication
du couac et de très nombreuses plantes sont présentées
aux enfants qui s'y intéressent malgré de très mauvaises
conditions climatiques.
L'après midi est consacré à
la visite de l'exploitation agricole de M et Mme Buffard à la savane
Matiti et sera un gros succès grâce à l'implication
des propriétaires.
Cette visite difficile à mettre au point à
cause du prix du transport non financé dans le projet car non finançable
a eu une grande importance dans l'évolution du groupe. Source d'un
plaisir évident par sa rareté dans l'univers scolaire des
élèves de Guyane elle a permis de régler définitivement
les gros problèmes de violence dans la classe en les faisant apparaître
et en donnant à l'équipe enseignante les moyens de les comprendre
et de les traiter ; le groupe va alors complètement s'investir dans
la réalisation du projet prévu.
Cette sortie n'a été possible que parce
que le collège a pris en charge le paiement du car.
Réalisation des projets : la veillée contes du 21 mai
La phase de restitution des contes est alors abordée
au retour des vacances de Pâques. Plus de deux mois se sont écoulés
depuis l'écoute mais la mémoire des enfants est parfaite
: la restitution a alors lieu collectivement une heure par semaine où
la classe est dédoublée grâce à l'heure de soutien.
Cette restitution est essentiellement orale et repose sur le choix des
élèves. Là encore ce sont des élèves
« perdus » qui se montrent les meilleurs participants. Il est
possible de vérifier combien l'écoute des enfants a été
efficace alors même que le projet de « veillée contes
» où ils seraient appelés à raconter leur avait
à peine été présenté. La personnalité
des conteurs, leur présence, leur investissement sont des modèles
pour les enfants qui cherchent visiblement à les imiter par pur
plaisir. Il faut 3 séances dédoublées pour arriver
à restituer une dizaine de contes.
Puis viennent alors les choix des contes à
raconter pour la veillée contes. Tous les élèves étant
amenés à participer il faut procéder à un découpage
avec plusieurs conteurs et intervention de chúur chanté ou parlé.
Un travail sur l'oral, la voix , la correction grammaticale du passé
simple, la présence du conteur est alors engagé pendant 6
h toujours dédoublées. Le professeur de français consacre
alors deux heures par semaine au projet.
Le choix des contes a été fait par
les enseignants et les élèves. A été retenu
le conte "TÉZEN LE POISSON
D'EAU DOUCE" dans sa version haïtienne. Il en existe une version
guyanaise que Compper avait du reste racontée- C'est le groupe classe
qui l'a voulu pour permettre la chanson que la jeune fille de la classe
avait chantée lors de la toute première séance et
qu'elle a apprise à tout le groupe ; deux contes amérindiens
ont été retenus par les élèves : "LE
TIGRE, LE SINGE ET L'HOMME", conte facétieux et "LE
MAKAWEM OU CORBEAU À 2 TÊTES", récit de voyage
initiatique extrêmement riche en aventures. Enfin la classe a choisi
un conte en créole : "TCHOTCHO
PA LÉ RANTRÉ", conte de randonnée reprenant
le sujet de « Biquette qui ne veut pas sortir du chou » que
Franck Compper avait raconté de manière très vivante
en l'adaptant totalement au contexte guyanais. Les élèves
qui choisiront ce conte s'y montreront inventifs et brillants, dépassant
en liberté leur modèle. Or il s'agit d'élèves
qui au début d'année s'étaient surtout fait remarquer
comme des meneurs très destructeurs...
Les conteurs volontaires avaient tous des niveaux
scolaires différents, du meilleur élève au plus faible.
La mise en place a demandé un gros investissement car si certains
se sont révélés avec un véritable talent tous
ont dû travailler pour s'améliorer.
Certains contes ont été théâtralisés
pour permettre à tous de participer ; cette théâtralisation
s'est bien entendu faite sans support, costumes ou accessoires, reprenant
simplement la façon propre à un conteur de jouer son histoire
dans uns sorte de présence physique et d'investissement corporel.
Un accompagnement musical à base de percussions a été
inventé sans aucune aide par les élèves. Ils ont aussi
inventé une chanson chorale pour le conte Macawem qui avait la forme
d'un rap. Ils ont complètement réinvesti les contes en brodant
librement tout en respectant le contenu. Ils ont rajouté des formules
de début aux contes amérindiens. Ils se sont donc appropriés
les contes tout en les respectant.
Les contes racontés en créole ont
été ceux où les élèves se sont montré
le plus à l'aise avec une grande capacité inventive et d'improvisation.
La veillée contes s'est déroulée
le 21 mai 2002 au CDI sur invitation des élèves. A noter
qu'ils ont invité tous leurs enseignants qui sont venus nombreux
et ont été assez étonnés par leur performance.
Le professeur de musique a été très ému quand
à la fin sans que personne n'ait été au courant ils
se sont regroupés pour chanter une chanson de Balavoine apprise
au cours de musique et qui n'est pas anodine : « SOS ».
L'écriture et l'illustration du recueil
Au cours de la phase de restitution certains se
sont mis spontanément à écrire, bien entendu parmi
ceux qui maîtrisent le mieux l'écrit et qui ont alors fait
de remarquables progrès. Au lendemain de la veillée tous
ont répondu positivement à la suggestion de faire un recueil
sur ce que la classe avait vécu autour des contes. Ils étaient
peu ou prou habitués au traitement de texte, en particulier pour
ceux du groupe soutien qui ont toute l'année écrit individuellement
et collectivement à leurs correspondants d'Angers, souvent à
partir de photos.
Chacun va donc choisir un conte court ou un extrait
de contes dont la mise au point demandera au moins 6 séances, ce
qui fait que les élèves vont continuer à travailler
alors qu'habituellement un relâchement se fait nettement sentir dans
les collèges début juin. A noter que tous les textes sont
cohérents et très personnels. Le passé simple est
de mieux en mieux maîtrisé ainsi que l'emploi des temps d'une
manière spontanée.
Plusieurs élèves ont tenu à
écrire leur conte en créole, ce qui montre que le goût
pour l'écrit peut passer par le plaisir d'écrire sa langue
maternelle.
Les illustrations seront réalisées
en trois séances en cours d'arts plastiques, après une visite
de l'exposition d'une artiste Catherine Hallier, venue exposer au
collège. Cette artiste utilise de maière originale différents
matériaux comme le sable, la terre. Les élèves ont
eu comme consigne de « faire parler une ou plusieurs couleurs »,
ils ont été invités à utiliser un matériel
insolite pour eux comme éponge, paille pour souffler la couleur...La
deuxième consigne était de remercier les conteurs par un
dessin.
Tous n'ont pu terminer mais les réalisations
retenues font preuve d'un grand investissement ; le professeur a noté
que certains se racontaient le conte en peignant.
Tous ont pu repartir avec un recueil reprenant leurs
propres productions et une partie commune sur la visite chez les Palikur.
Ils ont eu beaucoup de plaisir à réaliser ce recueil, en
particulier pour la première page qu'ils ont réussi à
mettre en page eux mêmes. Chaque élève a également
tapé et mis en page son propre texte.
Un bilan :
Notons tout d'abord que les retombées positives
du projet ont été mises en évidence lors du dernier
conseil de classe :
tous les élèves ont progressé par rapport à
eux mêmes et des récompenses nombreuses ont été
distribuées pour la première fois.(encouragements, tableaux
d'honneur, félicitations). Tous sont passés en cinquième
sauf trois élèves.
Les graves problèmes de violence ( racket,
indiscipline) ont quasiment disparu
Le rapport à l'école et aux apprentissages
a été modifié
L'interculturel :
Ce projet montre qu'il peut être simple et
très efficace de faire concrètement appel à la diversité
culturelle de la Guyane.
L'intervention en classe de représentants de ces cultures permet
aux enfants de se situer autrement par rapport à l'école
qui trop souvent ignore ce qu'ils sont. C'est cette reconnaissance d'eux
mêmes que les élèves ont vécu dans cette classe
à travers l'introduction de langues et cultures du pays où
ils vivent. Dés le début la présence de ces adultes
motivés par le désir de faire connaître leur patrimoine
a suscité la surprise et très vite le plaisir.
Il paraît important de ne pas présenter
toutes ces cultures présentes en Guyane en même temps mais
il est indispensable de consacrer un temps assez long à une culture
bien définie, comme nous l'avons fait avec les contes palikur. Chaque
culture doit pouvoir bénéficier de ce temps de rencontre
qui seul permet la diffusion de connaissances. Ensuite les enfants pourront
recréer à partir de ce qu'ils ont reçu.
:
Le conte, l'oralité et le passage à l'écrit
Le fait que le conte est encore -ou presque- vivant en Guyane en fait
un outil privilégié de la maîtrise de la langue orale
et du passage à l'écrit. Après une phase d'imprégnation
par l'écoute, la phase de restitution permet d'acquérir une
réelle maîtrise de l'oral qui par líacquisition de structure
de texte, de structure de phrase, de vocabulaire, de conjugaison de temps
réputés difficiles comme le passé simple, et va faciliter
énormément le passage à l'écrit.
Bien sûr il faut un conteur à l'aise devant des scolaires,
motivé et compétent dans son domaine. Nous avons eu la grande
chance de pouvoir rencontrer de tels conteurs : qu'ils en soient remerciés
!
Le coût financier du projet :
La DRAC et le Rectorat ont donné 5800 F.
pour ce projet. Les intervenants ont été financés
sur la base de 300 Fttc pour 10h30 d'intervention. Le reste des dépenses
a concerné la réalisation et l'édition du recueil,
avec l'achat de matériel d'arts plastiques, le scan des dessins
et les photocopies couleur et noir et blanc.
Ces projets se déposent en mai précédant la rentrée
scolaire selon un dossier qui vient du Rectorat . Madame Salomé est responsable de ces projets.
Qu'elle soit aussi remerciée ainsi que les participants au projet
:
Conteurs :Madame Fortino Mauricienne responsable de l'association Kamwyeneh,
1 village amérindien
de Macouria
Franck Compper, association Krakémantò
Saint-Laurent du Maroni
Lama Topo, association culturelle aluku, Maripasoula Merci aux aides éducateurs responsables de la salle informatique
du collège République, Cédric et Wilson, ainsi qu'à
Monsieur Arnaud, Principal du collège et à Madame Perrot,
Principale adjointe
Bibliographie :
-Langues de Guyane, document CELIA, IRD Cayenne
-17 randos nature de Philippe Boré
-Mato contes aloukous par Adolphe Anelli/trad. Serge Anelli (MI WANI SABI/les
deux fleuves) -Mato : contes des aloukous de Guyane Serge Anelli (Mi Wani Sabi/Conseil
International de la langue française)
-Tezen poisson d'eau douce de Mimi Barthélémy (l'Harmattan)
-Le colombo de tortue de Gustave-Ho-Fong Choy (association des
amis de l'école élémentaire de Maripasoula)
-Le Caprice de Maïpouri : conte galibi raconté par Paul
Blaise (les deux fleuves)
-Contes amérindiens de Guyane édité par E. Navet et
0. Lescure (Conseil International de la langue française)
-Enfants des Caraïbes de la Guyane à Panama (Fleur de Lampaul)
Gallimard jeunesse
-Faune de Guyane ONC
-trois posters sur les graines et les fruits de l'ONF
-Guide de reconnaissance des arbres de Guyane ONF
-La forêt d'Amazonie (ed Fleurus) Ce projet de classe à PAC (Projet Artistique et Culturel) a été
réalisé dans une classe de sixième du Collège
République à
cayenne
Avec la participation de :
Bénédicte Lampécinado (professeur de français)
Nicole Launey (professeur de français soutien)
Jeannie Evuort (professeur d'histoire géographie)
Palou Caravero (professeur d'Arts Plastiques)
Et des aides-éducateurs responsables de la salle informatique :
Cédric et Wilson
Nous remercions aussi les conteurs qui sont venus dans la classe
:
Monsieur
Topo Lama
Monsieur
Franck Compper (Association
Krakémantò de Saint-Laurent du Maroni)
Madame Fortino
Mauricienne (Association Kamawyeneh 1 village kamuyeneh PK 24 macouria)
Merci à Madame Perrot principale Adjointe et à Monsieur
Arnaud principal du collège
Ce petit livre ne serait pas paru sans l'aide de CAMPUS
SERVICES que nous tenons à remercier
particulièrement. |